Acheter des matières premières sans argent liquide

Retour au sommaire

Commerce Équitable Aperçus
Mobile Payment in Burkina Faso

Entre novembre 2019 et janvier 2020, nous avons fait directement participer 2554 familles d’agriculteurs à notre chiffre d’affaires. Dans ce cadre, nous avons payé 1325 agricultrices et agriculteurs par le biais de leur téléphone portable.

Nous payons toujours plus de familles agricultrices en Afrique via téléphone portable. Trois questions et trois réponses sur ce mode de paiement.

Pourquoi gebana paye-t-elle des familles d’agriculteurs en Afrique via téléphone portable ?

Par le biais d’un paiement par téléphone portable, nous veillons à ce que les agriculteurs et agricultrices reçoivent effectivement le montant que nous leur versons. En effet, le versement est lié à un numéro de téléphone : il est donc personnalisé et direct. Les intermédiaires ne peuvent plus, désormais, détourner à leur profit une partie du montant, qui était auparavant réglé en espèces.

Pour chaque transaction déclenchée par téléphone portable, un justificatif permet de savoir qui a payé combien à qui. Cela nous aide à tenir notre comptabilité et met un terme au blanchiment d’argent, fort répandu dans l’achat de matières premières.

En outre, cela permet à nos collaborateurs d’avoir moins d’argent liquide sur eux lorsqu’ils se rendent chez les familles d’agriculteurs. Le risque d’agression diminue – y compris pour les familles d’agriculteurs.

Par ailleurs, les familles peuvent ainsi gérer leur argent plus facilement. Le téléphone portable fait fonction de compte en banque, ce dernier restant rare au Burkina Faso : en 2017, seuls 22 % de la population étaient titulaires d’un compte bancaire.

Comment fonctionne le paiement sans espèces par téléphone portable ?

La forme de transfert d’argent par téléphone portable dont nous nous servons au Burkina Faso et au Togo est bien plus ancienne que le smartphone. Dans de nombreux pays d’Afrique, il est donc fort courant d’envoyer de l’argent, de payer des factures ou même de faire ses courses sans espèces, à l’aide de son téléphone portable.

L’argent arrive sur le téléphone portable par le biais d’un SMS. Dans les grands villages et dans les villes, des magasins – les dénommés « cash-kiosks » – permettent de charger de l’argent sur sa carte SIM ou de retirer le crédit existant sous la forme d’argent liquide.

Nous avons testé le paiement sans espèces notamment dans le cadre de la participation au chiffre d’affaires au Burkina Faso. Là-bas, nous avons travaillé avec Orange Money. Ce prestataire y a déclenché, à chaque fois, un grand nombre de versements en même temps. Entre novembre 2019 et janvier 2020, nous avons fait directement participer 1325 familles d’agriculteurs à notre chiffre d’affaires.

Lorsque nous achetons, en revanche, des marchandises comme des noix de cajou brutes, nous payons les agricultrices individuellement. Dans les régions dans lesquelles nous ne pouvons pas régler la marchandise de cette manière, nous transférons l’argent sur les téléphones portables de nos collaborateurs sur le terrain. Ceux-ci retirent l’argent au cash-kiosk le plus proche puis, munis de l’argent liquide, ils se rendent chez les coopératives et les agriculteurs.

Quels sont les plus grands défis que gebana rencontre avec ce type de paiement ?

Comme nous l’avons mentionné, les versements sont liés au numéro de téléphone portable des agriculteurs. Certes, c’est une très bonne chose, car cela permet de garantir des paiements directs. Mais malheureusement, les agriculteurs changent souvent de numéro. Cela signifie qu’avant chaque versement, nous devons vérifier ce dernier avec le plus grand soin. Cela prend beaucoup de temps.

L’adhésion à ce type de paiement constitue un autre défi. Même si beaucoup de personnes se servent du téléphone portable pour payer, nous devons former les familles agricultrices à la gestion de l’argent numérique et les convaincre de ses avantages : sécurité accrue, absence de personnes intermédiaires, transparence et confidentialité, argent disponible sur un compte mobile.

Au Burkina Faso, il arrive que la couverture réseau insuffisante dans les campagnes nous joue des tours. Il faut parfois attendre plusieurs heures jusqu’à ce que l’argent arrive sur les téléphones portables. S’y ajoute le fait qu’il n’y a pas encore de cash-kiosks à proximité de villages isolés.

La situation se complique lorsque nous envoyons l’argent vers un numéro de téléphone erroné et qu’il est donc versé à une personne qui n’y a pas droit. Récupérer cet argent est parfois impossible.

Si nous parvenons à surmonter tous ces défis ou à occulter ceux qui ne sont pas de notre ressort, il reste encore la question des coûts de transaction. En effet, chaque transfert d’argent par le biais du téléphone portable entraîne des frais partagés par l’expéditeur et le destinataire ou pris en charge par l’un d’entre eux.

Lors du versement de la participation au chiffre d’affaires, nous déduisons les frais de transfert du montant final. Ceux-ci sont donc à la charge des agricultrices.

Lorsque nous achetons des produits bruts et que nous les payons par le biais du téléphone portable, nous ne pouvons et ne voulons suivre la même démarche. Nous préférons partager les frais avec les agriculteurs. Mais actuellement, nous les prenons intégralement en charge afin d’augmenter l’adhésion des familles à ce mode de paiement et de les convaincre de ses avantages.

Nous nous heurtons aussi à l’opposition des coopératives et de leurs présidents, des anciens du village et des collecteurs. Ils se sentent court-circuités par le paiement direct via téléphone portable. Ils perdent une partie de leur contrôle et de leur pouvoir et ne peuvent plus rogner sur le prix d’achat. Bien sûr, ce sont des choses qu’ils veulent éviter.


Paiements réalisés via téléphone portable, situation en septembre 2020

  • Burkina Faso : 1325 familles d’agriculteurs sur 2554 ont participé au chiffre d’affaires via le téléphone portable.
  • Burkina Faso : noix de cajou brutes de 164 familles d’agriculteurs payées via téléphone portable.
  • Togo : produits bruts d’env. 250 familles d’agriculteurs payés via téléphone portable.